Comment est née l’idée de fonder Avril ?
J’ai travaillé pendant 17 ans chez Auchan, où j’ai occupé de nombreux postes différents. J’ai notamment été responsable de tout le pôle “Droguerie Parfumerie Hygiène” (DPH) et c’est là que j’ai eu l’idée de créer Avril. Je constatais que la cosmétique bio se vendait peu, ce qui était paradoxal : les gens voulaient utiliser des produits bio, mais ces derniers étaient trop chers pour eux. De fait, ils se rabattaient sur les produits conventionnels. Je me suis aussi aperçu que les marques, dans la cosmétique, dépensaient beaucoup d’argent pour se faire connaître et entretenir la désirabilité. C’est ce budget marketing qui augmente le coût des produits. Ma réflexion a donc été simple : et si on supprimait ces frais publicitaires pour proposer des produits bio à un prix abordable ? L’idée a germé dans ma tête. J’ai quitté Auchan… et créé Avril. L’objectif était de rendre le bio accessible à tout le monde, grâce à un modèle économique original dans le secteur de la cosmétique.
La suite, on la connaît : Avril a connu une belle évolution depuis sa création, en 2012.
Oui. Au début, nous avions deux canaux de distribution : notre site Internet et des revendeurs. Les débuts ont été un peu compliqués, car nous n’avions effectivement pas prévu de budget pour nous faire connaître… et ça a très bien marché, puisque nous étions vraiment totalement inconnus et ne vendions presque rien.
Il a fallu du temps – et beaucoup de bouche à oreille – pour qu’Avril se développe. Mais c’est arrivé : au bout de 4 ans, nous avons ouvert notre première boutique à Lille. En 2017, nous en avons ouvert 2 autres. Puis 4 autres en 2018. Tout s’est accéléré. Aujourd’hui, nous en avons 65, et notre gamme de produits s’est grandement étoffée. Malgré tout, ils répondent toujours au positionnement d’Avril : proposer des produits de très bonne qualité, bio, avec le moins d’emballage possible et un prix très abordable.
Quels ont été les principaux défis liés à la création d’Avril ?
Notre premier défi, ça a évidemment été de devenir rentable.
Le second, c’était de faire en sorte que les gens puissent essayer les produits avant de les acheter – c’est là que nous avons ouvert notre première boutique. C’était un vrai challenge de changer de mode de distribution, de créer un nouveau canal. Nous avons appris en faisant et nous avons relevé le défi, puisqu’à ce jour, nous avons développé un vrai réseau de boutiques. Il faut dire que, chez Avril, nous sommes une toute petite équipe (30 personnes au siège), mais nous sommes efficaces. C’est dû, entre autres, à notre organisation en mode “entreprise libérée” : chacun(e) prend des décisions en toute autonomie, et ça fonctionne.
Mais notre principal défi, c’est de réduire l’empreinte environnementale d’Avril. Il y a de nombreux domaines dans lesquels nous avons mené des actions clés, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Je pense notamment à la réduction des emballages. Il y a 3 ans, en mettant en place un système de recharge pour un certain nombre de nos produits (poudre, blush, fard à paupière, etc.), nous avons éliminé 10 tonnes de production de plastique par an. Nous sommes également parvenus à décarboner une partie de nos transports : aujourd’hui, la moitié des produits Avril prennent le train pour leur transport amont. Enfin, depuis 2 ans, nous adhérons à 1% for the planet. Nous reversons 1% de notre chiffre d’affaires à des associations de protection de l’environnement (par exemple, Terre de liens, qui transforme des fermes en fermes bio). Ainsi, nous améliorons en continu notre empreinte carbone. Mais il reste encore plein de choses à faire, et c’est ce qui nous motive au quotidien.
Quel regard portez-vous sur le marché du bio actuellement dans le monde de la cosmétique ? Les marques s’emparent-elles plus du sujet ? Y a-t-il du green washing ?
De plus en plus de marques de cosmétiques se préoccupent de l’environnement. Certaines communiquent plus que nous, d’ailleurs, et c’est une bonne chose : cela permet d’infuser dans l’esprit des gens l’idée qu’il est important d’acheter des produits qui sont meilleurs pour l’environnement, mais aussi pour leur peau et leur santé. Aujourd’hui, il y a un état d’esprit général qui accorde plus d’importance à la naturalité des produits.
Néanmoins, il y a parfois une vraie confusion entre “bio” et “naturel”. L’avantage d’être certifié bio, c’est que tout cela est vérifié par un organisme indépendant, qui valide que la marque, comme Avril, est bien conforme au cahier des charges de la cosmétique bio – et ce cahier des charges est très exigeant. Certaines marques se proclament naturelles, mais quand ce n’est pas certifié, cela peut être plus ou moins sincère.
Quelle a été votre “raison de faire” lorsque vous avez créé Avril ?
Notre “raison de faire”, c’est de réduire l’empreinte environnementale de la cosmétique. Chaque progrès, aussi petit soit-il, est une victoire. Je me souviens de la première livraison en train de l’une de nos boutiques, à Nice, le jour de son ouverture : c’est un moment symbolique qui m’a rempli de joie ! Nos pratiques deviennent chaque jour un peu plus responsables, plus respectueuses de l’environnement. Et cela nous donne beaucoup d’élan pour la suite.
Par ailleurs, quand j’ai créé Avril, c’était d’abord pour répondre à un enjeu écologique. Mais au fil des années, un autre aspect a pris de l’importance : la santé. De nombreux clients et clientes nous racontent qu’ils et elles ne toléraient plus aucun produit, avant de découvrir l’une de nos crèmes. Ces témoignages m’interpellent. On commence à prendre conscience des effets des cosmétiques sur le corps humain – et je suis convaincu que cette prise de conscience va s’intensifier dans les années à venir.