Alors que se profile le second tour de l’élection présidentielle, certains commentateurs politiques ne cessent d’évoquer le clivage qui anime les débats : « souverainistes » contre « mondialistes ». Mais qu’entend-t-on vraiment par souveraineté ? Existe-il vraiment un monopole du discours souverainiste ?
Du latin superus, supérieur, la souveraineté est le pouvoir suprême reconnu à l’État, qui implique l’exclusivité de sa compétence sur le territoire national (souveraineté interne) et son indépendance absolue dans l’ordre international où il n’est limité que par ses propres engagements (souveraineté externe). (L’article 3 de la Constitution française de 1958 dispose que « la souveraineté nationale appartient au peuple, qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum ».)
Or, dans un monde globalisé, interconnecté et soumis aux aléas des crises, peut-on encore se passer d’une souveraineté européenne ? Nous avons tous perçu lors de la pandémie à quel point l’Europe a représenté une protection indispensable, un échelon de souveraineté « économique » fort au sein duquel pourraient néanmoins s’insérer des mesures protectionnistes (comme la taxe carbone) vis-à-vis d’un système économique planétaire complexe. Avec les deux finalistes aux élections présidentielles, deux visions de l’Europe s’affrontent, opposant le candidat de la souveraineté européenne à la candidate de la souveraineté nationale qui projette, si elle est élue, de remplacer l’Union Européenne par une alliance européenne des nations.
Grandes perdantes de la mondialisation, livrées à des courants mondiaux violents, les classes populaires semblent chercher désormais le retour en arrière en soutenant les leaders nationaux-populistes, se revendiquant souverainistes, qui leur promettent de « reprendre le contrôle », selon le slogan simpliste mais efficace inventé par les Brexiters au Royaume-Uni. Mais n’’est-ce pas, finalement, la meilleure façon de totalement le perdre ? « La République c’est le droit de tout homme, quelle que soit sa croyance religieuse, à avoir sa part de la souveraineté. » Jean Jaurès.
Delphine Jouenne