Depuis jeudi dernier, les Français ont la possibilité de déclarer en ligne leurs impôts. Malgré quelques modifications apportées par la loi de finances au service du pouvoir d’achat, cette étape reste une épreuve pour bon nombre de contribuables.
Revenons aux racines étymologiques de l’impôt. Tribut, corvée, dîme, gabelle, taille, cens… Très loin de la contribution collective, celle qui permet à tout un chacun de partager les frais et reposant sur une certaine idée de justice et d’équité, le vocabulaire lié à l’impôt a toujours eu une connotation de brutalité.
Le mot impôt provient du terme latin imponere, qui signifie imposer. C’est ce terme qui a donné naissance à celui d’imposteur, qui désignait en France la personne chargée de récolter l’impôt, de pratiquer l’imposture. Si, à l’époque, aucune connotation négative n’y était associée, avec le temps l’imposture est devenue tromperie.
Quant au fisc, il vient du latin fiscus qui désigne le petit panier destiné à presser le raisin. Nous retrouvons d’ailleurs ce sens dans l’expression « la pression fiscale ». Le mot qualifie, du temps de l’empereur Auguste, son trésor personnel alimenté par les dépôts des contribuables romains et recouvrés par l’exactor, celui qui contraint au paiement. Il existe également à Rome un « fiscal », soit un juge pratiquant la torture. Le terme est d’ailleurs resté dans certains pays, comme l’Espagne, pour désigner les magistrats du ministère public. Le fisc, dans son rôle, fait entrer de l’argent ou des récoltes dans le Trésor. L’expression de sa force réside dans son pouvoir de confiscare, c’est-à-dire de confisquer, s’accaparer sans contrepartie des avoirs appartenant à un contribuable.
La contribution semble, quant à elle, étymologiquement beaucoup plus participative. Elle repose sur le tributum romain que les populations vaincues par Rome devaient payer en signe de soumission, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir. En France, au XVème siècle, le sens est resté puisque le terme désigne la contribution payée de force à un seigneur féodal, toujours en signe de soumission. Payer son tribut à la mort, voilà une image porteuse de sens.
Et le prélèvement à la source ? Depuis janvier 2019, cette expression a pris un sens nouveau dans la tête, ou plutôt devrait-on dire, dans le porte-monnaie des Français.
Fruit d’une bataille vieille de 80 ans, c’est François Hollande qui décide de sa mise en place et Emmanuel Macron qui en hérite. Praelevare signifie littéralement : « lever d’abord ». Composé de prae, « d’abord avant » qui a donné « pré », et levare, « lever ». Ainsi, dès l’origine… Ou disons plutôt… À la source du mot ! Le verbe signifiait déjà « lever avant ». Alors pourquoi y ajouter les termes : « à la source », si son étymologie y renvoie déjà ?
Tout simplement parce qu’avec le temps, le verbe a pris la signification de « lever », soit prendre une partie d’un ensemble, d’un tout. Et si l’on revient à levare en latin, le verbe est un dérivé de levis, c’est-à-dire léger, d’où l’utilisation du sens figuré « soulager » ou « alléger ».
Bref, avec la mise en place du prélèvement à la source, l’État nous propose finalement de soulager notre porte-monnaie ! Altruiste me direz-vous ?
Delphine Jouenne